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Hansel et Gretel traite de l’isolement, de sa possible transgression, et de notre rapport à la morale : qu’est-ce qui, de la morale dont nous avons été imprégné le plus souvent à nos dépens, persiste en nous, envers et contre tout ?

Un frère et une sœur, suite à un amour interdit, ont été éloignés l’un de l’autre depuis leur enfance. Des années plus tard, ils se retrouvent dans la cave de la maison familiale pour consommer leur amour en secret. L’histoire se situe le jour de leur mariage. Afin de donner de la consistance à la fête, ils se sont inventés une assemblée d’invités, qu’ils ont eux-mêmes filmés et interprétés devant leur caméra. Une pléthore d’amis, de cousins, de relations vont ainsi défiler dans l’intimité de leur cave. Mais au fur et à mesure de la soirée, les invités se font moins conviviaux et les cadavres ne tardent pas à sortir avec grands fracas des placards… À jouer les apprentis sorciers, ils deviendront prisonniers d’un jeu qu’ils ont eux-mêmes initié.

Au milieu du plateau, une grande table de mariage est dressée. Les acteurs/personnages sont assis au centre. À leurs côtés trônent sept téléviseurs dans lesquels sont diffusés les visages en gros plan de leurs invités. Ces visages, ce sont les leurs, car ils ont eux-mêmes filmé et interprété tous les invités de leur prétendue fête. Habillés et grimés comme des personnages de théâtre ou comme autant d’archétypes d’une société condamnatoire, ils se confrontent à leur propres images, tour à tour juges et bourreaux. Le public assiste à un trouble jeu identitaire où les acteurs/personnages se débattent dans leur propre mise en scène – une fois de plus les acteurs prennent en charge une grande partie de la technique du spectacle – et livrent un combat acharné avec eux-mêmes. Mise en abîme perpétuelle, le dispositif est au centre d’une fiction aux strates multiples, libre à chaque spectateur d’y plonger complètement ou de demeurer à la surface.

Très impressionnante, la nouvelle création de Jean-Benoit Ugeux et Anne-Cécile Vandalem poursuit l’exploration de la solitude abordée avec Zaï Zaï Zaï Zaï. On retrouve un couple isolé, cette fois confronté aux invités de leur mariage. Mais il n’y a personne : les époux ont joué et filmé leurs hôtes. La synchronie entre le jeu des acteurs et les téléviseurs est sidérante. La froideur qu’elle crée l’est tout autant. Notre attention s’y perd un peu, mais notre esprit bout quand il comprend peu à peu les raisons profondes de tout ce dispositif. Un spectacle aussi angoissant que magistral.  Laurent Ancion, Le Soir, 2006

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